Igishanga

igishanga Isabelle Lafon

Tiré du livre de Jean Hatzfeld

Dans le nu de la vie – Récits des marais rwandais

Editions du Seuil, octobre 2000.

Prix France-Culture 2001

Spectacle conçu et joué par Isabelle Lafon

Avec la collaboration de Daniel Schémann

et la voix de Léonard Binama

Lumières : Marion Hewlett, Patrice Lechevallier

photo Fred Kihn

 

 

Critiques

 

Ce spectacle offre l’exemple fascinant, presque miraculeux, d’une transposition maîtrisée. On admire d’autant mieux le travail d’Isabelle Lafon que tout son jeu paraît improvisé, léger, vivant.
Frédéric Ferney – Le Figaro

 

(…) Soudain elle se décide. Elle referme le livre lentement. Elle plonge. Une sorte de miracle s’accomplit. Avec sa voix seule, les mots de sa propre langue et quelques gestes de la main, Isabelle Lafon parvient à restituer le lent parler sinueux et pacifique du pays des mille collines.
Daniel Conrod - Télérama

 

Un projet d’une singularité et d’une force inouïe.
Jean-Pierre Han - Témoignage chrétien

 

Les deux femmes, devenues grâce à elle personnages, apparaissent, dans cette mise en scène d’une grande sobriété, non plus en victimes silencieuses mais en figures héroïques.
Le Monde

 

Deux paroles. Deux voix, tantôt filet, tantôt flot. Entre l’horreur et la vie à nouveau possible. Impressionnant.
Mathilde de la Bardonnie - Libération

 

Entre les propos lents, diction emblématique d’un processus laborieux, la gorge d’une femme se serre. On craint le sanglot, il est ravalé pour le silence.
Aude Brédy - L’Humanité

 

Revue de presse Igishanga

 

 

Notes

 

« Cultivatrices, bergers, commerçantes, enseignantes, assistante sociale, aide maçon, ils racontent jour après jour, à Nyamata ou sur les hauteurs environnantes, au gré de leurs hésitations ou de leurs difficultés à évoquer certains souvenirs et au fil de questions nouvelles qui apparaissent en les écoutant. (…)

(…) Un génocide n’est pas une guerre particulièrement meurtrière et cruelle. C’est un projet d’extermination. Au lendemain d’une guerre, les survivants civils éprouvent un fort besoin de témoigner ; au lendemain d’un génocide, au contraire, les survivants aspirent étrangement au silence. Leur repliement est troublant. (…)

(…) Un génocide est – résumant la définition de l’un d’entre eux – une entreprise inhumaine imaginée par des humains, trop folle et trop méthodique pour être comprise. Le récit des courses dans les marécages de Claudine, d’Odette, de Jean-Baptiste, de Christine et de leurs voisins ; la narration, souvent durement et magnifiquement exprimée, de leurs bivouacs, de leur déchéance, de leur humiliation puis de leur mise à l’écart ; leur appréhension du regard des autres, leurs obsessions, leurs complicités, leurs interrogations sur leurs souvenirs ; leurs réflexions de rescapés, mais aussi d’Africains et de villageois, permettent de s’en approcher au plus près. »

Jean Hatzfeld

« Ce qui distingue la poésie de la parole machinale, c’est que la poésie nous réveille, elle secoue en plein milieu du mot. Ce dernier se révèle alors à nous d’une étendue bien plus vaste que nous l’imaginions, et nous nous souvenons soudain que parler veut dire se trouver toujours en chemin. »

Ossip Mandelstam

« Jean Hatzfeld demande un jour à Sylvie : « Comment fais-tu pour si bien parler et dire tant de choses ? » Elle répond : « Tu sais, Jean, quand on a voyagé dans le nu de la vie, cela coule de source. »

Il y a pour moi dans le livre de Jean Hatzfeld quelque chose qui aussi coule de source par rapport au théâtre. On pourrait dire que c’est d’une certaine façon impossible de jouer ces textes embourbés par le thème du « génocide rwandais », par le fait qu’il vaudrait mieux les entendre dire par les vraies personnes.

Mais c’est face à cet «impossible», et à toutes ces interrogations qui sont réelles que le théâtre a son présent, sa place. C’est comme l’origine de la parole poétique.

J’ai joué Igishanga de nombreuses fois au Théâtre Paris-Villette, puis en tournée. Pourquoi y revenir encore ? Parce que d’une certaine façon je n’en reviens pas de ce texte, je n’y reviens jamais, je ne fais qu’en partir. Je finis toujours par éprouver l’envie joyeuse d’en repartir. Point de départ incontournable, l’œuvre de Jean Hatzfeld est tout sauf une suite de témoignages de rescapés du génocide rwandais. Non, chaque témoignage est un récit à la première personne du singulier. Pas de plainte ni de pathos dans ces histoires mais une émotion qui pousse le vivant devant nous. Alors je prends le livre dans la main, je m’assois, je commence à lire puis je saute dans leur voix, leur accent, leurs gestes, leur rire, leur pudeur bouleversante pour provoquer une sorte d’apparition dans la fragilité lumineuse du plateau. »

Isabelle Lafon

« Jean Hatzfeld nous rapporte ces paroles implacables et pudiques qui décrivent le génocide et tentent de le penser, et ces pensées de haute volée tentent à leur tour de résoudre cette question : Comment vivre après le génocide et faire que l’espoir subsiste ? Admirables d’intelligence et de lucidité, ces récits rencontrent la réflexion de Robert Antelme sur l’irréductible de « l’espèce humaine ». Non dénués d’humour et de gaieté, ils sont la preuve poétique que l’humanité tient bon. C’est cette victoire de l’humain sur sa tentative d’anéantissement qu’Isabelle Lafon célèbre sur le plateau en incarnant ces deux héroïnes. »

Daniel Schémann

 

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